MINES-UE14-miniprojet

Que signifie vraiment « zéro émission nette »?

(Encadrant : Sandrine Selosse)

Les questions d'approvisionnement et de consommation plus efficace en énergie, tout comme les politiques climatiques, font l'objet d'une attention croissante depuis ces dernières décennies, tant dans les sphères scientifiques et publiques que dans les débats politiques. Au cœur des défis de société, les enjeux énergie-climat imposent de complètement repenser le système énergétique mondial et orientent particulièrement vers la fin des combustibles fossiles. En ce sens, l’Accord de Paris signale sans ambiguïté une transition vers des systèmes décarbonés jusqu’à un objectif « net zéro » afin que l’activité humaine soit climatiquement neutre et que la température se stabilise.

La capture et séquestration du carbone (CSC) – notamment lorsqu’elle est combinée avec la bioénergie comme technologie à émissions négatives (NET) – est alors apparue comme l’une des trois principales options technologiques permettant l’atteinte de cet objectif, les deux autres étant l’amélioration de l’efficacité énergétique et l’utilisation croissante des énergies renouvelables. Plusieurs travaux ont été menés pour mettre en perspective d’une part, ces gigatonnes évitées d'émissions de CO~2~ attendues des investissements dans les technologies de CSC, et d’autre part, les importantes capacités de stockage de carbone à mobiliser et les risques de surexploitation de la filière biomasse-énergie. D’autres technologies d’éliminations du CO~2~ sont considérées (CO~2~ removal – CDR), comme l’afforestation, la capture directe du carbone ou encore la fertilisation des océans [1]. Pour autant, la comptabilisation des émissions négatives n'est pas simple car l'élimination du CO~2~ de l'atmosphère a un effet différent sur la concentration atmosphérique que les émissions évitées, par exemple grâce à l'utilisation du CSC [2]. Cela est dû à la dynamique du cycle mondial du carbone, avec le carbone stocké dans les océans, la lithosphère et la biosphère, et les flux de carbone entre ces puits.

Dans notre contexte de réalisation d’un objectif de neutralité carbone, la question se pose dans l’évaluation des budgets carbone ou de la tarification du carbone. La valeur des émissions négatives de CO~2~ peut apparaître différente de celle des émissions évitées (positives) qui devrait alors se refléter dans le prix des quotas dans le SEQE qui est interprété comme un prix de référence pour les émissions évitées. L'effet des émissions négatives sur la concentration atmosphérique est plus faible que celui des émissions évitées en raison du fonctionnement du cycle du carbone mais leur valeur pourrait augmenter si la réduction des émissions de GES n'est pas suffisante pour atteindre l'objectif climatique, si d'autres réductions d'émissions s'avèrent trop difficiles et coûteuses, ou si la concentration atmosphérique de CO~2~ atteint un point de basculement où le rythme du changement climatique et de ses effets négatifs s'accélère [3].

Dans ce contexte, ce projet vise à explicitement définir ce que représentent ces émissions de CO~2~ et le rôle qu’elles peuvent jouer dans l’objectif de neutralité carbone. Il s’agira alors d’apporter un éclairage sur les points de vigilance qui en découlent dans la comptabilisation des émissions, les politiques climatiques associées, les marchés carbone et les choix technologiques qui en découlent.

Contact : sandrine.selosse\@mines-paristech.fr

Bibliographie :

[1]https://aura.abdn.ac.uk/bitstream/handle/2164/10642/Minx_2018_Environ._Res._Lett._13_063001.pdf;jsessionid=1469AA57EAD76965EBF7F2AB16CF9C0C?sequence=1](https://aura.abdn.ac.uk/bitstream/handle/2164/10642/Minx_2018_Environ._Res._Lett._13_063001.pdf;jsessionid=1469AA57EAD76965EBF7F2AB16CF9C0C?sequence=1)

[2] Jones, C. D., Ciais, P., Davis, S. J., Friedlingstein, P., Gasser, T., Peters, G. T. et al. (2016). Simulating the Earth system response to negative emissions. Environmental Research Letters 11. doi:10.1088/1748-9326/11/9/095012

[3] Torvanger, A. (2019). Governance of bioenergy with carbon capture and storage (BECCS): accounting rewarding and the Paris agreement. Climate Policy 19:3, 329-341. doi:10.1080/14693062.2018.1509044